Le démembrement de contrat d'assurance vie est un outil efficace
Dans le cas de l'assurance vie, nous avons tous en tête le plafond de 152.500€ de transmission sans taxe à chacun des bénéficiaires lors du décès de l'assuré pour les primes versées avant 70 ans.
Pour un couple avec 2 enfants, généralement, c'est le conjoint survivant qui est premier bénéficiaire (il n'y pas de seuil de taxation pour une transmission entre époux).
Les enfants sont en deuxième rang dans la liste des bénéficiaires.
Dans la clause bénéficiaire classique, c'est la pleine propriété du solde des contrats qui est reçue par le bénéficiaire
L’époux survivant peut néanmoins se désister au profit des bénéficiaires suivants : les enfants. Ce désistement peut être conçu en cascade : les enfants peuvent ainsi se désister aussi au profit des petits enfants si ces derniers sont mentionnés dans la clause bénéficiaire.
Le désistement prive alors le survivant de l'usufruit.
Le démembrement stipulé dans la clause bénéficiaire rédigée de son vivant permet de conserver l'usufruit au survivant.
Attention :
L'abattement de 152 500€ est soumis aux clés de répartition NP/US (article 669 du CGI) de manière à être partagé entre le nu propriétaire et l'usufruitier comme nous le rappelle l’article 990 I du CGI
« En cas de démembrement de la clause bénéficiaire, le Nu-Propriétaire et l'USufruitier sont considérés, pour l'application du présent article, comme bénéficiaires au prorata de la part leur revenant dans les sommes, rentes ou valeurs versées par l'organisme d'assurance, déterminée selon le barème prévu à l'article 669. Les abattements prévus au premier alinéa du présent I sont répartis entre les personnes concernées dans les mêmes proportions. »
On ne peut donc transmettre que 152 500€ à un couple NP/US en toute franchise de taxation. Dans le cas du conjoint usufruitier, ce dernier étant déjà exonéré de droits par la loi TEPA l'abattement AV ne sert que pour la part du nu-propriétaire (après application de la clé de répartition).
Il faut bien noter d'ailleurs que c'est l'âge de l'usufruitier ! et non celui du défunt qui est utilisé pour déterminer la clés de répartition.
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Ainsi dans le cas d'un couple avec 2 enfants bénéficiaires à parts égales de la nue-propriété et maintien de l’usufruit au profit du conjoint, au décès de l'un des époux, pour un bénéficiaire (un couple enfant/parent) l'abattement de 152.500€ doit être répartis entre Nu-Propriétaire et USufruitier suivant la clé de répartition fixée par l'âge de l'usufruitier.
Une somme de contrats démembrés de 400.000€ du défunt se ventile entre le survivant (usufruitier) et ses deux enfants.
Avec un usufruitier âgé entre 71 et 80 ans, pour chacun des couples NP/US, l'abattement de 152500€ se ventile en 106.750€ sur l'enfant NP et 45750€ sur l'US (survivant)
analyse pour 1 des 2 enfants :
Le complément à l'abattement (200000€ -152500€= 47500€) est taxable. Il se ventile entre NP/US suivant la même clé.
La part du NP(70% des 47500€=33250€) est soumise à la taxation de 20% et se traduit par un impôt de 6650€.
L'usufruitier (30% des 47500€=14250€) n'acquitte aucun impôt (loi TEPA)
En l’absence de démembrement, si les enfants bénéficiaient du même contrat en pleine propriété, l’impôt aurait alors été de 9500€ par enfant. A l’inverse si le conjoint bénéficiait de l’intégralité du contrat aucun abattement propre à l’assurance-vie n’aurait été utilisé étant déjà exonéré de droit par la loi TEPA.
Ainsi le démembrement de la clause bénéficiaire permet la protection du conjoint survivant qui perçoit le capital charge à lui de le restituer sans frais à son décès tout en préservant les intérêts fiscaux des enfants à 2 niveaux :
- En évitant la perte des abattements propre à l’assurance-vie lorsque le conjoint survivant hérite au premier décès
- En réduisant l’assiette taxable et donc l’impôt afférent pour les montants surpassant l’abattement de 152 500€ par bénéficiaire.
Il est à noter que le nu-propriétaire reste redevable de l’impôt (6650€ dans l’exemple) bien qu’il ne perçoive aucune liquidité.
Le défunt a donc intérêt à le protéger en prévoyant dans sa clause bénéficiaire que l'usufruitier acquittera l'impôt en lieu eu et place du nue propriétaire dont le montant sera déduit de la créance de restitution
Sur cette présentation sommaire, on voit bien la puissance du démembrement.
On en note également les risques à type de dilapidation du capital entrainant la spoliation à terme des nus-propriétaires ainsi que les risques fiscaux en cas de non enregistrement de la créance de restitution.
Le recours à un notaire, semble donc tout indiqué aussi bien dans la rédaction initiale de la clause que dans son application au décès de l’assuré. Elle n’est pour autant pas indispensable selon vos capacités ou celles du service juridique de votre assureur.
Je ne peux que vous inciter à approfondir cette question du démembrement de contrats
nota:
La clause bénéficiaire doit pouvoir être adaptée en fonction de l'évolution de la situation familiale.
Aussi, afin de ne pas avoir à y retoucher trop souvent, l'enjeu reste de trouver, au moment de sa rédaction, le bon équilibre pour préserver les intérêts (protection) souhaités pour chacun.